Mari de Mira

Elle est la cadette des Callaïdes, seulement âgée de quatorze ans au début du cycle.

Son cher père la voit comme la quintessence de la beauté des Shimajinnes. Problème : elle se voit comme la plus laide des Callaïdes et le désintérêt envers elle des jeunes gandins de la cour, plus attirés par les formes et le minois des quatre autres, n’est pas sans lui donner raison. Le sobriquet dont on l’affuble n’est en tout cas pas fait pour lui laisser espérer des regards plus énamourés : Mari est en effet surnommée « la naine jaune. »

Il faut dire aussi qu’avec sa petit taille, son faciès de buveuse de lait et surtout son corps fluet de danseuse plus fait pour défier les lois de la physique et fendre le vent que pour susciter une convoitise galante, la pauvre Mari n’a pas grand-chose pour mettre dans ses rets un fidèle suiveux.

Ajoutons à cela un tempérament de merde (on dit plutôt “de mouscaille” dans Les Callaïdes) aussi bien envers ses sœurs qu’envers sa servante, Jeanne, petite blonde un peu ronde avec laquelle la poupée shimabie forme un duo tout de contrastes.

Jeanne

« Pesteuse » est le qualificatif que les autres lui associent. Du reste elles l’étrangleraient volontiers si elles ne pouvaient s’empêcher de la couvrir de baisers. Ainsi Aalis, la seule des quatre qui, après un fâcheux incident, est allée jusqu’à… mais peut-être est-il préférable de jeter un voile pudique sur le tour tragi-sentimentalo-comique que prit un jour leur relation.

Des cinq, Mari est celle qui m’est le plus apparue au début comme une esquisse. Une esquisse d’abord physique : taillée à la serpe, elle n’a aucun point commun avec les corps voluptueux des autres. Et même chose au niveau du caractère. Elle apparaît d’abord enjouée, moqueuse envers une autre en particulier, et quelque peu craintive quand la reine fronce les sourcils. En fait assez insignifiante. Mais assez rapidement, elle s’est étoffée, à l’image d’une vaste garde-robe qu’elle possède et qui fait d’elle un écho à la Japonaise capable de se magnifier avec deux trois bouts de chiffon qui de prime abord ne payent pas de mine. Quoique d’un tempérament ombrageux qui fait d’elle un personnage à associer au feu, elle tendra, dans les virevoltes de ses pas de danse, qu’elle pratique la kalani ou une autre danse, à s’émanciper de cet élément pour ne faire qu’un avec le vent.

Sa destinée évoluera surtout dans le livre II, notamment lors de dix chapitres inauguraux écrits sous l’influence admirative d’une grande dame du XXe siècle, mais aussi lors d’une scène où il sera question de vingt-huit colonnes de fumées. N’en disons pas plus car le personnage attire à elle les scènes les plus improbables et il est bon que le lecteur les découvre par lui-même.

Je terminerai juste en indiquant que la perspective de noircir des pages et des pages sur la danse, art que j’apprécie mais pour lequel j’ai des connaissances limitées, a été un véritable plaisir. Oui, Mari est surnommée « la naine jaune » par les imbéciles. Mais les vrais connaisseurs, comme un certain P*** qui apparaîtra dans le livre II, savent bien que son vrai surnom est la « danseuse des danseuses ». Ce ne sont pas une rivale du Shimabei et un certain jeune homme qui diront le contraire.

Gaspard Auclair

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