Grégorius de Bartaban est le troisième Déïmos.
Très vite, l’image que j’ai eue de lui s’est trouvée à la conjonction de trois personnages. D’abord, ceci :
Jean-Louis-Ernest Meissonnier a fait de beaux portraits de militaires. Celui-ci évoque clairement le XVIIe siècle et, par la carrure du modèle, rappeler un certain Porthos. Grégorius est de la même race, celle des géants ou, pour reprendre le mot dans le titre de l’ultime chapitre dans lequel apparaît le personnage dans la trilogie des Mousquetaires, des titans.
Après, le rapprochement s’arrête là car contrairement au modèle, Grégorius n’a pas la même vanité démesurée et la même épaisseur d’esprit (épaisseur qui n’empêche pas de rendre Porthos terriblement attachant). La langue peut claquer, notamment vis-à-vis de Garbiel, deuxième Déïmos avec lequel il aime à échanger des piques. Et ce qui peut claquer aussi, ce sont ses paumes sur le cul de ses deux servantes, Thérèse et Fanny, ancelles d’un genre particulier puisqu’il s’agit de servantes à Déïmos, type à la fonction bien définie et qui n’est pas sans s’attirer les foudres et les piques de nobles dames du château. Pour donner une idée de leur particularité, disons juste que lors d’un paragraphe, j’ai dû me souvenir inconsciemment d’une scène avec James Coburn dans Pat Garrett et Billy the Kid.
On est loin de la vie débonnaire de Porthos dans son château de Bellefond et de ses roucoulades sans suites avec la femme de Planchet. Je ne m’étire cependant pas trop dans les détails car sa vie intime est surtout évoquée dans le livre II.
Quant à sa force au combat, c’est très simple, il m’a été impossible d’ignorer ce beau personnage :
Les amateurs auront reconnu Raoh, du célébrissime manga Hokuto no Ken. Bon, n’imaginez pas non plus des combats de la même eau que ceux qu’on y trouve mais sachez que lorsqu’il se met en renaud, Grégorius ressemble alors à Raoh, et ce ne sont pas ici les Wärlanders (un jour, j’expliquerai ce qu’est un Wärlander) qui me contrediront. Juste un regard, et on peut sérieusement se compisser dessus.
Enfin, il y aurait une ultime inspiration, celle du personnage de Guillaume d’Orange que l’on trouve dans tout un cycle de chansons de geste du XIIe siècle. Je l’avais découvert à travers le Couronnement de Louis. Je n’avais jamais pensé qu’une chanson de geste puisse être aussi drôle. Cela tient du personnage de Guillaume, brute épaisse attachante bien connue pour la puissance de son poing qu’il envoie de préférence au beau milieu de la gueule de ses ennemis. Et farceur avec ça ! Alors qu’il s’impatiente à entendre un vieux donner de mauvais conseils à son roi, il ne fait ni une ni deux, il s’en saisit pour le défenestrer, moyen radical pour aider son roi à prendre de bonnes décisions. Quant à son duel contre le terrible Corsolt, le géant sarrazin, j’y ai vu une sorte d’Excalibur mélangé à du Mad Max. Bref, mélange des genres détonnant que celui proposé par le cycle de Guillaume d’Orange et ça tombe bien, car le mélange des genres, j’apprécie fort (j’y reviendrai prochainement).
Dans les deux premiers livres, on entend davantage Grégorius parler qu’on ne le voit combattre. Pas forcément de quoi être déçu puisqu’au contraire de Raoh, il a un petit potentiel comique – caractéristique qui le rapproche de Porthos. J’ai cependant quelques beaux projets en matière de perçage de peaux pour les trois derniers livres. La bête, à la quarantaine bien entamée, a des envies de repos mais je ne l’entends pas ainsi car il peut y avoir tout plein de jolis massacres à narrer. Après, pour ce qui est de savoir si elle survivra, je n’en suis pas encore là…