Marguerites

Définition du DRA (Dictionnaire Royal Académique) :

Marguerites : nom féminin qui, au pluriel, peut désigner soit la fleur à pistil jaune et à pétales blancs, soit les cheveux blancs qui apparaissent à la vieillesse. Chez une dame, ces derniers pouvant, selon les cas, être considérés aussi bien comme les meilleurs alliés de l’aimanide que comme leurs pires ennemis. Pour cette dernière notion, voir sa notice dans le DRA.

Extrait d’un article de Diane de Monjouy (voir les autres articles de cette dame ayant travaillé pour La Gazette du Royaume) :

Il n’existe pas d’âge pour les premières marguerites. Chez certaines, elles pousseront après la cinquantième année tandis que, chez d’autres, elles apparaissent dès les vingt ans. Elles sont souvent synonyme de désespoir chez les dames, qui n’y voient là que le signe d’une hideuse décrépitude, d’un honteux asséchement, d’une beauté qui s’évanouit prématurément. Et bien des femmes sont tentées d’y suppléer par quelque coquet bonnet de soie ou bien en appliquant à leur chevelure de ces teintures onéreuses et risquant de causer plus de mal que de bien (voir notre article paru il y a deux septaines recensant les mixtures qui sont absolument à éviter. Mesdames, encore une fois, ne prenez aucun risque, votre chevelure est comme une amie d’enfance et l’une de vos meilleures alliées pour vous attacher votre gent ami le plus longtemps possible). Je pense que ces dames ont tort. Tout l’art est de mettre en valeur les champs de marguerites qui vous viennent et non de les ôter comme s’il s’agissait de mauvaises herbes. Voyez votre chevelure comme un jardin printanier qu’il va vous falloir organiser de manière à ce que ces marguerites y semblent parfaitement à leur place. Une mèche coquette, une barrette, un serre-chef, des maillettes, nous ne manquons pas d’artifices pour rendre joliets et naturels des cheveux supposés (à tort) hideux et malvenus. Il n’est que de voir dame Helena pour s’en rendre compte. Je lui ai demandé dernièrement si ses cheveux ne l’encombraient pas, elle s’est contentée lors de lever les yeux au ciel et de me répondre ceci:

« Mais Diane, vous savez bien que l’aimanide suppose une tranquille acceptation du temps qui passe. Si je commençais à m’inquiéter de son passage, si je m’efforçais à combattre son étreinte, soyez sûre que je tomberais dans l’artifice et que je deviendrais comme l’un de ces dames lourdement fardées (tenez, comme madame T*** que je vois passer) qui semblent des réclames vivantes des derniers produits de nos pommadiers. Je n’ai pas l’orgueil de croire qu’à mon âge j’irradie encore d’aimanide. Mais je les aime fort, mes marguerites, et j’ai la faiblesse de croire qu’en les aimant, elles me le rendent et permettent à cette aimanide de subsister encore. »

Certes, on arguera sans doute que dame Helena est bien aise de parler ainsi, la Kirklandaise ayant été bien favorisée au début de son existence par dame Nature. Mais nous pourrions multiplier les exemples de dames dont nous nous sommes habituées à voir les marguerites et pour lesquelles il ne nous viendrait pas à l’idée de dire qu’elles ressemblent à des croquantes édentées avec déjà un pied dans la tombe. Au contraire, ces dames continuent à leur passage de faire tourner vers elles de mâles regards, y compris des regards de jeunes apprentis chevaliers. Il existe d’ailleurs une expression à la mode chez les jeunes gens qui montre bien que les débuts de la fanaison ne signifient en rien décrépitude : ce type de dame à marguerites est appelée « mère que j’aimerais adoucer. » On peut bien imaginer tout ce que l’on veut derrière ce verbe mais il montre bien que le passage du temps n’est rien tant que subsiste le sentiment d’une parfaite plénitude, d’une parfaite conscience tranquille de sa beauté.

La septaine prochaine, nous parlerons des moyens pour rassurer une jouvencelle quand arrivent ses premières fleurs.

Diane de Monjouy

 

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