Jan d’Alverny (prononcer « djann », voir ici) est le principal personnage masculin du cycle. Si l’on excepte le bon roi Marceau, il est d’ailleurs le premier à être évoqué dans l’histoire.
Jan est beau, poli, bien élevé et possède de belles boucles blondes. D’abord benêt transi, puis suiveux idolâtre tout droit échappé de l’Astrée enfin redoutable bretteur désespéré, le jeune épéiste a connu plusieurs métamorphoses et va continuer à en connaître d’autres car lorsque j’écris « enfin », il s’agit seulement du premier Livre. Tout en gardant un côté candide, le personnage continue d’évoluer dans le deuxième, accomplissant d’un côté une action gravissime à l’encontre de quelqu’un, effectuant de l’autre plusieurs hauts faits lors d’une terrible nuit qui contribuera à hanter sa vie pour longtemps.
Et ce n’est pas fini car la tentation est souvent bien forte d’explorer l’enfance d’un personnage et de faire découvrir sa famille. Charis, dès le deuxième chapitre du Livre I, n’y échappe pas. J’aurai attendu plus longtemps concernant le père Jan, mais arrivé à l’écriture du Livre III, ça y est, j’y suis, et jusqu’au cou encore ! Ça a commencé par le récit d’une histoire sordide survenue du temps d’un de ces ancêtres avant de dérouler avec celle d’aïeuls plus lumineux, puis celle d’un secret de famille touchant personnellement Jan. J’eusse pu faire plus court, d’autant que cet arc n’a pas été sans me flanquer des bâtons dans les roues pour certaines raisons mais enfin, comme le personnage est destiné à rester sur le devant de la scène, je ne crois pas avoir perdu mon temps.
Au début simple coquille non pas vide mais légère, Jan s’est peu à peu épaissi et, outre la gloire d’avoir vaincu nombre d’adversaires par l’épée, peut s’enorgueillir d’inspirer tout particulièrement la muse de sa dame. Et ce dès le début car voici l’un extrait d’un poème que la jeune Charis de Verley, seize ans, a griffonné le soir même de leur première rencontre, dans le salon de la reine où Jan faisait ses débuts de garde (nous restituons les vers dans l’orthographe de l’époque) :
Fébrile estrangeté de cette vue,
Douce émotion qui volt me saisir.
Ô ma plume, sauraz-tu retranscrire
Tot ce que mes chastes lèvres ont tu ?
La dolor est vive en ce morne seinz
De pucellë qui n’a aimé jamais.
Que ce bel ange blond aux mille apprêtz
Daigne le charesser de son parfum.
Suivent vingt autres décasyllabes dans lesquels Charis cède à une fureur poétique un peu inconvenante. Pour en avoir une idée, il faut lire le Livre II où est reproduit in extenso un poème de cent vers dans lequel la Callaïde explique… certaines choses (quel tempérament !). Il a bien de la chance, ce Jan ! Enfin, chance relative avec la masse de nuages orageux qui s’amoncellent sur sa tête dans ce même livre…