Les Callaïdes

Elles sont cinq.
Jeunes, belles, douées pour les arts et incarnant chacune d’obscures nymphes s’appelant Phœbe, Danallis, Lilaïa, Zephixo et Amete. Leur fonction dans la vie ? Distraire une reine, Catelyne, femme quelque peu morne devant subir les dérèglements libidineux d’un royal époux lorsqu’il s’ennuie de ses exploits ancillaires.
Voilà, les Callaïdes, c’est juste ça. Du moins au début car avec la centaine de personnages qui va entrer en piste, ça va sérieusement se compliquer pour elles, en particulier pour la jeune Charis de Verley, la représentante de Phœbe, la poétesse du cénacle, douée également pour le dessin, la peinture mais aussi pour plier maladroitement la réalité aux imaginaires dont cette bouffe-livre enragée (pour reprendre un terme usité alors) a su farcir sa jolie tête. Une chappe s’ouvrira et les pleurs n’auront pas fini de couler.
Les pleurs, mais aussi le foutre et le sang. En quantité non négligeable, pour ce dernier.
Car oui, si le souvenir des dames d’Henriette d’Angleterre (dans le Vicomte de Bragelonne, de Dumas) a sans doute inconsciemment présidé à la création des Callaïdes, dites-vous bien que durant 800 pages, on ne reste pas non plus sagement dans le salon de la reine à les écouter cailleter gentiment sur la dernière robe vendu au Bas Galant (dans le quartier de la Traversaine) ou sur la dernière œuvrette en vers de dame Charis. Non, dans un univers où l’on trouve un roi pervers, une reine ingrate, un prince perfide, des apprentis-chevaliers ayant la rage de s’entretuer, un sinistre apothicaire ou encore une somptueuse princesse Shimabie, un homme taureau du nom de Grégorius de Bartaban et un homme porc opportunément nommé Bertrand Cochard, vous vous doutez bien que tout ne va pas forcément bien se passer pour mes héroïnes en culotte de dentelle.
Il va falloir en tout cas qu’elles se fassent davantage Milady de Winter que Constance Bonacieux si elles veulent survivre, car elles ont signé avec moi un contrat pour exister le temps d’un cycle romanesque de cinq volumes. « Signez, signez mes belles, que je leur ai dit, n’ayez crainte, le job, ça va être du nanan, avec beaux bijoux, belles robes et célébrité à la clé ! » Elles ont mordu à l’hameçon, un rien jobardes. Mais je n’en tire aucune gloire non plus car maintenant, c’est moi qui sue à grosses gouttes à devoir gérer un cheptel de cinq divas ne tenant pas compte des consignes dans les scripts que je leur donne. Et de plus en plus insolentes, avec ça ! Ces donzelles estiment que rien n’est trop beau pour elles et qu’il eût été indigne de leur consacrer un misérable roman de trois cents pages, comme c’était le plan à l’origine. Du coup elles m’ont fait cracher mes tripes et c’est huit cents que j’ai dû aligner en six mois. Le deuxième tome ? Mille ! Quant au troisième, en cours d’écriture, j’en suis à quatre cents et j’ai l’impression que je suis à peine arrivé au quart.

Aalis de Castalia, la rousse Callaïde, personnage central du troisième tome, commence d’ailleurs un peu trop à se prendre pour Rita.

Du coup, qui est l’esclave ? qui est le maître ? Pas évident de répondre mais comme elles sont agréables à la vue, sentent bon la Fleur de Lune et montrent de l’inventivité dans leurs séances d’improvisation qui les font jeter aux orties mes scripts préparés avec amour, je leur pardonne cette fièvre qui par deux fois m’a donné le plaisir de voir se dérouler sous mes yeux un univers grouillant d’êtres et de passions, ainsi que celui de mettre le point final à un volume. Plaisir fugitif et singulier, à la fois euphorisant et apaisant, comme le gong d’un bonsho au milieu d’un jardin japonais.
Concernant le cadre de cet univers, il sera constitué de huit royaumes. Le nom du royaume principal, celui dans lequel vivent les Callaïdes ? On ne le connaîtra jamais. En revanche le lecteur découvrira au fur et à mesure les noms des royaumes voisins : le Shimabei (pays très japonisant), le Kirkland, l’Ohini, etc. Pour ce qui est de l’époque, j’ai pris mes aises. Si j’aime le Moyen Âge, j’apprécie aussi la Renaissance, le XVIIe siècle illustré par certains romans de Dumas, et une certaine noirceur propre au XVIIIe.

Noirceur pas toujours constante d’ailleurs.

J’ai donc mis ces époques dans mon mixeur narratif, je m’y retrouve pleinement en terme de plaisir d’écriture et je ne crois pas qu’il y ait lieu d’être dérouté pour le lecteur.
Un mot sur ce site : il sera autant une présentation du cycle qu’un complément. J’y évoquerai mes influences, des correspondances avec d’autres fictions – romanesques, cinématographiques voire opératiques – qui ont pu m’influencer. Mais il s’agira aussi pour moi de m’amuser. Pour le moment je n’explique pas en quoi consiste la rubrique “les choix de Péquin & Boudur” puisque ce sont deux personnages qui apparaissent dans le deuxième livre. Mais “la Gazette du Royaume” sera le moyen d’explorer davantage ledit royaume et sa capitale, avec ses quartiers, ses boutiques, ses gueules pittoresques. Accessoirement ce sera un laboratoire qui me permettra de coucher de nouvelles idées, peut-être même d’y piocher pour les volumes à venir. Concernant la section “la langue des Callaïdes”, il ne s’agira pas de savoir si elles embrassent avec cet organe ou si elle sont agiles à donner des coups de langue, mais de se pencher sur l’aspect lexical du cycle. Pour cela aussi, je ne m’en suis pas tenu à une seule époque : ancien français, moyen français, français classique, argot du XIXe siècle, néologismes. Pas de quoi être effrayé non plus, je n’aime pas les romans qui poussent trop loin le curseur concernant la véracité langagière. Quant à la section “les armides”, si vous faites une rapide recherche concernant ce terme, vous comprendrez vite fait son propos.
Voilà. C’est le troisième site que je créé. Celui-ci aura pour particularité de se nourrir d’une œuvre tout en essayant de l’alimenter, mécanique qui, je l’espère, fonctionnera à plein rendement. Je ne suis pas trop inquiet, après plus de deux mille pages écrites, l’univers a pris de l’ampleur et Charis, Mari, Aalis, Sybil et Alya sont maintenant plongées dans mille et une intrigue au milieu de mille et un personnages. Il n’y a qu’à se pencher pour trouver de nouvelles idées. Le tonneau des Callaïdes semble sans fond, lui aussi.
Au lecteur d’y puiser pour y trouver l’ivresse.

Gaspard Auclair

Un mot sur le rythme de parution : le premier volume est donc sorti. Le deuxième est achevé, je me réserve juste une ultime relecture. Il sortira en 2022.
J’ajoute que chaque livre sera scindé en deux tomes. Non par choix mercantile mais à cause d’impondérables techniques liés notamment au nombre de pages maximum toléré par les plateformes d’auto-édition. En tassant bien, c’est-à-dire en jouant sur les marges et la taille de la police j’étais parvenu à une première mouture descendant sous les 700 pages. En revanche, je sentais que bien des yeux allaient saigner. Étant le premier à gémir quand je me trouve face à une mise en page blindée de caractères, et surtout me disant que la situation ne pourrait qu’empirer avec le deuxième livre (plus long de deux cents pages par rapport au premier) et le troisième (en cours d’écriture mais je pressens 1200 pages en tout), j’ai donc fait le choix de partager le premier livre en deux, et ce sera pareil pour les autres volumes. Et puis, je me suis aperçu qu’il n’était pas désagréable de reproduire le schéma des publications au XIXe siècle, avec des romans divisés en plusieurs tomes.
Enfin, pour se procurer les livres, c’est chez Amazon uniquement (pour l’instant). C’est un peu ennuyeux, je sais, mais là aussi, ce choix a ses raisons. Mauvais papier chez telle plateforme, censure chez telle autre (les scènes de sexe, c’est mal !), du coup j’ai tout envoyé baladé pour Amazon. On verra plus tard si un concurrent offre une alternative intéressante.

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